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L'événementiel pour toucher son public

Publié le : 22 mai 2018 à 15:48
Dernière mise à jour : 24 mai 2018 à 15:44
Par Alice Jan Dahan, Anne Vacca et Loris Zadikian

L’événementiel est une composante primordiale de la communication publique. À l'heure du numérique, l’événement se transforme mais reste indispensable tant à l'animation et à la promotion du territoire qu'aux relations de proximité avec les habitants. Objectifs, outils de mobilisation, gestion, valorisation, évaluation… les différentes étapes qui conduisent à la réussite d’un événement sont ici synthétisées comme un mini guide.

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Par Alice Jan Dahan, Anne Vacca et Loris Zadikian, étudiants en Master 2 Communication politique et institutionnelle à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Salle comble pour les ateliers du dernier Forum Cap'Com (décembre 2017) au Havre consacrés à l’événementiel. Des événements de proximité incontournables pour animer la vie locale aux grands évènements qui positionnent le territoire, les communicants publics sont avides de décrypter ce qui fait leur réussite. Alice Jan Dahan, Anne Vacca et Loris Zadikian, étudiants en Master de communication politique et institutionnelle à l’Université Panthéon-Sorbonne, ont tenté de synthétiser les recommandations formulées pendant différents ateliers du Forum. Un travail qui s’appuie autant sur les présentations analysées que sur les questions et échanges qui ont animé les débats.

Comment créer et gérer un événementiel fédérateur ?

Quel communicant n’a jamais rêvé d’un événement réussi ? La communication événementielle est un atout considérable pour une collectivité dans le sens où elle permet de renforcer en interne ou en externe sa cohésion ainsi que l’image de son équipe et celle du maire ou de l'élu. Elle propose en effet une interaction directe entre le pouvoir et les habitants.

C’est précisément pour cela qu’un événement ne serait rien sans son public. Un événement doit ainsi cibler un public particulier, dans un sens défini, afin d’attirer des participants, de véhiculer une image positive de l’organisateur, ou encore de fédérer le public autour d’un temps fort mis en avant. Un événement organisé par une collectivité locale est l’outil indispensable à l’animation du territoire, à son dynamisme et à son rayonnement.

Le dynamisme, notamment culturel, d’une ville joue pleinement dans la compétition entre territoires. Il permet d’affirmer une identité locale propre et constitue de ce fait un enjeu majeur dans la différenciation des territoires. En plus de bénéfices en termes d’image, d’attractivité touristique ou de gains économiques, l’événementiel peut permettre aux collectivités de rassembler autour d’une identité commune et de valeurs qui lui sont associées. Les grands événements organisés par les villes sont l’occasion de fédérer les habitants, de raviver leur appartenance commune et de créer du lien entre eux. Cette cohésion n’est pas forcément vouée à disparaître une fois l’événement fini, comme le souligne bien l’exemple de l’anniversaire des 500 ans du Havre que nous expliquerons plus tard. Au contraire, il est crucial de pérenniser l’impact qu’a pu avoir le projet sur les différents groupes, notamment en mettant en place des dispositifs de communication ou d’évaluation. L’événementiel et la culture sont de plus des outils éminemment politiques, qui peuvent œuvrer à la cohésion sociale, au rayonnement d’un territoire et ainsi valoriser durablement l’exécutif local.

Afin d’avoir un impact durable et efficace, il s’agit de réaliser en amont un vaste travail de définition des besoins, des objectifs, du cadre technique ou encore des caractéristiques du public qu’on cherche à atteindre. Ainsi, l’organisateur doit pouvoir répondre à toute une série de questions comme : que célèbre-t-on ? comment ? quelle image cherche-t-on à donner à son exécutif ? à son territoire ? quels publics cherche-t-on à atteindre principalement ? quels impacts espère-t-on avoir sur ce public ? quel est le budget ?

Une autre question se pose alors : celle des acteurs impliqués dans le projet. C’est une problématique essentielle puisque l’événementiel et la culture sont des domaines particulièrement propices à l’inclusion de nouveaux acteurs ou groupes. Face à la demande d’implication croissante des citoyens dans la vie locale, il semble pertinent de faire des habitants de véritables parties prenantes du projet.

Il est également nécessaire de bien cadrer le message, son contenu et ses supports afin de toucher lesdits publics de manière efficace. Nous nous proposons ainsi quelques pistes et recommandations afin de maximiser et de pérenniser les effets d’un évènement sur la population locale.

CE QUE NOUS PROPOSONS POUR UN ÉVÉNEMENTIEL FÉDÉRATEUR :

  • Rendre possible une réappropriation du territoire et de l’événement par les publics → il faut inviter le public à découvrir ou redécouvrir le territoire, en étant disruptif.
  • S’y prendre à l’avance pour avoir le temps de nouer des partenariats diversifiés (public/privé, artistique, budgétaire) → ne pas hésiter à aller chercher des financements pour réaliser l’événement comme on le souhaite
  • Même si ces évènements visent des publics d’échelles différentes, il est fondamental de prendre en compte les acteurs locaux, de créer de l’adhésion, une dynamiquefavorable et durable → orienter les objectifs en termes d’attractivité du territoire et de fédération de la vie locale pour plus d’acceptabilité et plus de visibilité (notamment avec les réseaux sociaux)
  • L’animation de la ville ne doit pas se faire en utilisant des décors déconnectés de la réalité du territoire mais cette dernière n’est pas exclusivement détenue par les habitants du territoire → avoir recours également à des partenaires extérieurs peut permettre de renouveler le regard et d’être plus lucide.
  • Bien que fugaces, ces évènements doivent être marquants et susciter adhésion, envie et fierté.
  • La stratégie de communication se doit d’être dynamique et multi-terrains → susciter de l’implication et de l’attente en multipliant les supports et en jouant des particularités de chacun de ces supports.
  • L’évaluation clôt l’événement, le pérennise et permet retour sur expérience et ajustement de la stratégie
1ère étape : déterminer les objectifs à assigner à l’évènement

Établir l’audience

Pour qu’un événement soit réussi, il faut avoir un message clair qui s’adresse à un public déterminé en amont. Il s’agira donc d’établir un angle d’attaque.

Prenons par exemple la jeunesse. Comment la prendre en compte ? Comment toucher le jeune public dans l’organisation d’événements ? Comme l’a mis en exergue Anne Muxel lors de la plénière d'ouverture du Forum Cap'Com 2017 sur le thème « La jeunesse : l’entendre et agir avec elle », la jeunesse est le « temps de la vie marqué par des transformations constantes ». Or, la jeunesse s’étend sur des périodes parfois très larges (quand commence-t-elle, quand finit-elle ?), et oscille entre identification et expérimentation. Il faut noter que la catégorie « jeunesse » recouvre des conditions sociales et culturelles très diversifiées, il s’agit donc de parler aux « jeunesses ». Des caractéristiques propres aux jeunes sont néanmoins mises en évidence par la sociologue. Pour mieux les comprendre, nous disposons d’enquêtes comme la consultation de 2016 Generation What (320 000 jeunes participants), qui met en avant les grands traits caractérisant les jeunes générations : globalement, ils se traduisent par un pessimisme croissant vis-à-vis du futur de la société, mais en même temps par un optimisme personnel, l’importance des valeurs telles que la famille, ou le travail, le manque de reconnaissance par la société qu’ils peuvent ressentir, ou encore un sentiment d’appartenance à une ville ou une région moins fort que le sentiment d’appartenir au monde. Dans la stratégie de communication à établir, il est néanmoins proscrit de tomber dans le jeunisme (donner à voir une caricature des jeunes), et il nous paraît plus intéressant d’insister sur l’utilité sociale de la jeunesse dans la société. Ces grandes lignes peuvent permettre d’instaurer des messages plus adaptés aux ressentis et préoccupations des jeunes, et les rendre ainsi plus percutants.

Le festival des Transmusicales de Rennes semble avoir réussi à attirer les jeunes en axant la communication sur le dialogue interculturel, une programmation éclectique et tendance, et de nombreux supports numériques (réseaux sociaux, applications, etc). Bien que la cible première soit la jeunesse, l’événement réussit à dépasser cette audience et sert de vecteur de communication plus large, destiné à tous les publics et toutes les générations, promouvant la ville et à son dynamisme. Le festival, s’il s’adresse a priori à une population ciblée, contribue au rayonnement de la ville du fait de son association avec la jeunesse qui fréquente le festival. Il est donc indispensable de définir ce que l’on cherche en amont : une audience importante (critères quantitatifs) ou bien un haut taux de satisfaction (critères qualitatifs) ? Ce questionnement aidera à évaluer notre communication une fois l’événement passé.

Un autre dilemme intervient lors de la préparation d’un événement. Pour qu’un événement soit fédérateur, notre démarche doit s’appuyer sur les représentations mentales du territoire par les habitants. La question est donc de savoir : quelle identité mettre en avant afin de cibler le public attendu ? Faut-il s’appuyer sur les pratiques culturelles des habitants et l’héritage du territoire afin de les mettre en avant et de favoriser l’adhésion, ou bien apporter de la nouveauté afin de se départir des clichés ? Ici, plusieurs solutions s’offrent à nous.

Trouver la spécificité du territoire

On peut effectivement s’appuyer sur la spécificité du territoire et sur son identité traditionnelle pour permettre une plus grande cohésion sociale et attirer des touristes, souvent friands de la dimension « authentique ».

Un territoire peut trouver sa spécificité dans des caractéristiques physiques – comme un fleuve, une plage, des montagnes, un port maritime – ou historiques – comme une guerre, un événement, une pratique culturelle, etc. Un événement municipal peut donc tirer profit de cette richesse. C’est le cas de ce qui a été fait à Rouen avec L’Armada. Un élu de Rouen, Jean Le Canuhet a créé L’Armada en 1989 pour célébrer le bicentenaire de la Révolution Française. Il s’agissait de mettre en avant le port maritime. Des passionnés de grands voiliers et des professionnels ont alors lancé l’initiative de réunir des voiliers venus de loin (parfois jusqu’à 7 heures de trajet), ce qui a su susciter la curiosité des Rouennais. L’originalité de l’initiative, sa localisation, au pied d’une cathédrale, ainsi que sa dimension internationale ont contribué à son grand succès. Tous ces éléments ont fait de cet événement une occasion unique au monde. Les organisateurs ont fait le choix d’une gratuité totale afin de permettre au plus grand nombre de profiter de cet événement populaire, et ainsi de réunir tous les Rouennais. Si cette initiative est une réussite à Rouen, il faut néanmoins noter que tous les territoires ne disposent pas naturellement d’atouts géographiques ou d’un patrimoine historique aussi remarquables.

Il faut donc se départir de l’idée que la spécificité d’un territoire est une donnée naturelle. En réalité, tous les territoires ont une spécificité : celle que la collectivité va créer et mettre en avant. Il faut donc comprendre que cette marque distinctive d’un territoire ne va pas forcément de soi, mais qu’il faut la dessiner et en faire l’élément qui fera rayonner le territoire, qui réunira les habitants, attirera médias, touristes, entreprises ou investisseurs potentiels.

Il faut comprendre que la spécificité d’un territoire ne va pas forcément de soi, mais qu’il faut la dessiner et en faire l’élément qui fera rayonner le territoire, qui réunira les habitants, attirera médias, touristes, entreprises ou investisseurs potentiels.

Un premier trait caractéristique se trouve dans la place laissée aux initiatives des habitants. La collectivité peut se distinguer en promouvant activement la participation des individus dans l’organisation et l’implémentation d’un projet. Il s’agirait, pour fédérer autour d’un projet ou d’un évènement, de les associer, et ce en veillant à intégrer les habitants des différents quartiers, notamment périphériques, afin de favoriser les rencontres et la mixité sociale. L’organisation d’un évènement est l’occasion rêvée de connecter les différents espaces entre eux, d’unir les différents groupes qui composent le territoire autour de cette célébration commune. Il s’agit donc d’inclure les différents quartiers et espaces périphériques, mais également les associations ou les groupes d’animation de ces quartiers. Impliquer les individus dans l’organisation d’un tel projet permet trois choses :

  1. s’inscrire dans la tendance croissante à la participation citoyenne,
  2. créer de la cohésion autour de ce projet entre des groupes sociaux qui n’ont pas forcément l’habitude de se côtoyer,
  3. assurer une participation minimale de ces groupes du fait de leur implication dans le projet et d’une certaine reconnaissance de la collectivité à leur égard.

La nature “exceptionnelle” d’un évènement comme un anniversaire (les 500 ans du Havre), une reconnaissance (la double inscription de Strasbourg au Patrimoine mondial de l’Unesco) ou une autre célébration particulière, permet justement cette convergence des habitants et des forces politiques du territoire. Ce moment, où l’identité commune est célébrée et où le territoire attire, séduit les visiteurs et est valorisant aussi bien pour les habitants dudit territoire que pour l’exécutif qui instaure cette dynamique.

Proposer des éléments nouveaux et un regard neuf

Le danger principal de ce type d’approche est de se contenter d’élaborer des événements calqués sur une identité préalablement définie, voire stéréotypée. Organiser un bal de danses bretonnes parce qu’on est en Bretagne risque de ne pas attirer grand monde. Il ne s’agit pas pour une collectivité de reprendre ce qui fait, aux yeux de tous, l’identité du territoire sans retravailler cette identité. C’est pourquoi la collectivité devrait proposer des événements qui se détachent (au moins partiellement) de l’identité traditionnelle de cette collectivité, de l’image qu’on a déjà de celle-ci, afin de proposer des contenus plus originaux, plus attractifs et de faire évoluer son image.

La collectivité devrait proposer des événements qui se détachent (au moins partiellement) de l’identité traditionnelle de cette collectivité, de l’image qu’on a déjà de celle-ci, afin de proposer des contenus plus originaux, plus attractifs et de faire évoluer son image.

Nous avons pu discuter avec le directeur de la communication d’une mairie en Auvergne qui nous a expliqué avoir tenté de mettre en avant des groupes de musique auvergnate qui représentent selon lui parfaitement l’identité de la région. Cependant, cette identité traditionnelle ne semble pas suffisante pour incarner l’identité actuelle et évolutive du territoire. Bordeaux ne se résume pas aux cannelés, Marseille à son port, ni Reims à sa cathédrale. Laurent Cochini, le directeur de Sixième son, nous a expliqué qu’une musique autochtone (typique d’un territoire) ne pouvait entièrement constituer une identité sonore. En travaillant avec des entreprises qataries, Sixième Son, agence spécialisée dans le design sonore des marques, a estimé que le taux de musique qatarie traditionnelle qui répondait aux objectifs fixés pour forger une identité et attirer les cibles était de seulement 17%. En effet, cerner l’identité d’un territoire est une tâche complexe, voire impossible, puisque par définition elle évolue avec sa population. C’est pourquoi l’action de la collectivité doit faire en sorte d’enrichir constamment cette identité par des éléments nouveaux, en fonction de l’objectif qu’on s’est donné. Il faut donc mettre en avant des signes universels qui fédèrent les différents publics lors des événements.

Cette volonté de se départir d’une « vieille » image a notamment conduit Gérard Collomb, tout juste arrivé à mairie de Lyon, à mener d’une part, une politique culturelle se voulant innovante, et d’autre part, un repositionnement du marketing de la ville. Jean-François Lanneluc, son ancien directeur de la communication et directeur de cabinet, nous a expliqué comment la ville de Lyon, a cherché à devenir une nouvelle Barcelone, à la fois « fun et sexy ».

Toutefois, mettre en avant une identité locale forte ne signifie pas forcément reproduire des stéréotypes qui peuvent être gênants pour l’image de la collectivité, à l’ère des réseaux sociaux et de la dérision dont font souvent preuve les internautes. Cela peut au contraire être un atout efficace si on détourne les « clichés » liés à un territoire et si on joue de ses caractéristiques. C’est notamment ce qu’a pu faire la Bretagne avec sa campagne « Passez à l’Ouest », qui met dos à dos les clichés concernant les territoires breton et parisien (« vivre à 100 à l’heure », « les hipster vs. les pêcheurs » etc.), afin de valoriser la région, de montrer sa modernité, son dynamisme, et d’attirer les visiteurs parisiens. Un autre exemple de détournement peut être évoqué au travers de l’œuvre de Vincent Ganivet, Catène de containers, l’un des artistes exposant ses œuvres au Havre lors de l’été 2017, dans le cadre des 500 ans de la ville. Ces grandes arches de containers de couleurs sont à rattacher à l’image d’un Havre se résumant à un port industriel, triste et sans surprise. Cette installation prend justement le contrepied de cette représentation. Cette installation de 29 mètres de haut est audacieuse, dynamique, gaie et contraste avec l’image négative qui peut a priori être associée à la ville (cf. Guillaume Galienne dans Guillaume et les garçons à table, « c’était si moche qu’on se serait cru au Havre »). Reprendre les « stigmates » du territoire et les assumer au lieu de les subir pourrait être un moyen intéressant d’affirmer son identité locale, d’insister sur la lucidité de l’exécutif quant aux perceptions de leur territoire, et donner une image, de ce fait, différente de la ville. Cependant, ce retournement des lieux communs doit être considéré avec prudence, au cas par cas, et l’humour doit savoir être manié avec finesse.

2ème étape : mobiliser les outils

Après avoir élaboré notre stratégie, à nous de mobiliser des outils efficaces et innovants afin de concrétiser notre événement.

Les outils traditionnels incontournables

L’affichage reste encore aujourd’hui le roi des médias. Si l’affiche est bien faite, elle s’impose à nous dans notre quotidien, que ce soit en interne ou dans la rue. Mais ce qui compte surtout dans l’affichage, c’est la densité. L’œil ne voit que les informations nouvelles ; ainsi, quand quelque chose change, on le remarque. Pour qu’un plus grand nombre de personnes nous remarque, il vaut mieux privilégier la densité en condensant une campagne sur une courte période (par exemple 7 jours). Lors d’Un Été au Havre, une identité forte, constituée d’une typographie spécifique, fut déclinée – des marie louise déclinables, un aspect industriel en référence aux caractéristiques de la ville, des aplats de couleur fluo ainsi que douze visuels des œuvres avec le nom des artistes. Ce dispositif permit de bien identifier l’événement.

Nous recommandons également de démultiplier le message sur de nombreux supports et sur de nombreux réseaux d’affichage. La radio est un outil à ne pas négliger. On la privilégiera notamment pour promouvoir un événement très ciblé, géographiquement ou thématiquement. La radio représente un outil intéressant, également du point de vue du rapport prix/impact : 40 000 € hors taxes pour être présent pendant deux semaines, au rythme de 20 à 25 passages par jour sur France Bleu par exemple. Des créneaux moins chers mais ayant un fort impact sont à privilégier en fonction du contenu du message : avant et après des émissions culturelles (type Le Masque et la plume), avant et après les informations, la météo, le point route etc. Ces espaces garantissent une écoute minimale de la part du public, et même d’un public potentiellement intéressé. attractivité de s’engager dans des projets culturels. Au total, Un été au Havre a mobilisé 20 millions d’euros dont ¾ issus du financement public et ¼ récolté du mécénat privé.

Démultiplier le message sur de nombreux supports et sur de nombreux réseaux d’affichage.

Les réseaux sociaux sont mobilisables et apparaissent de plus en plus indispensables, même s’ils ne sont pas obligatoires pour réussir un événement, car ils n’atteignent pas les mêmes cibles que les autres supports. Les événements Facebook, live Tweets et photos Instagram permettent à la fois de promouvoir et de rendre compte du succès d’un événement, notamment auprès de la jeunesse.

La presse reste également un bon outil pour promouvoir un événement. Il s’agit de mettre en place une stratégie de relation presse précise, établie dans le temps et ciblée, afin de multiplier les potentialités de parutions. Le magazine de la collectivité reste un outil indispensable pour informer les habitants des activités organisées par la ville, notamment pour les personnes âgées, les familles et les jeunes adolescents. Concernant la presse quotidienne régionale, si elle s’érode dans les grandes villes, elle reste néanmoins fondamentale : d’une part puisque les grandes figures locales la lisent, et d’autre part car le contenu de la PQR est repris dans les autres journaux, notamment par les rédactions nationales. La presse locale reste donc un important vecteur de communication, un leader d’opinion non négligeable.

Il s’agira d’insérer de la publicité dans les journaux, mais également de contacter les journalistes pour qu’ils rédigent des articles positifs sur l’événement, assurant ainsi la promotion de ce dernier. Ces outils classiques n’empêchent pas de renouveler les formes de promotion. En effet, la diversification des supports, notamment numériques, et l’accoutumance d’un partie croissante des individus à ces outils permettent de diversifier les formes d’expressions et de multiplier les chances de toucher son public.

De nouveaux outils

De nouveaux outils de communication sont disponibles comme le teasing. Pourquoi ne pas l’utiliser pour un événement organisé par le service public et ainsi intéresser le public de manière spontanée et sans préjugés ? Le nudge, également très à la mode, permet de faire participer spontanément les individus, sans les contraindre ni forcément rationaliser les raisons de leur implication. Il ne s’agit pas d’imposer de manière autoritaire ou rationnelle un comportement, une participation, un engagement dans un évènement, mais de mettre en place un dispositif, souvent ludique qui amènera le public à prendre part à l’évènement. Un tel dispositif de communication prend les individus par la main, avant de leur exposer la manière dont ils doivent s’intéresser et participer à tel évènement. L’intérêt est moins rationalisé, plus rapide, volontaire ; la perception de l’évènement ne passe pas par un filtre de préjugés sur la collectivité, ou le type d’évènements. Cela correspond à de la gamification, un outil ludique qui permet d’introduire du jeu pour quelque chose qui ne l’était pas forcément. L’exemple des escaliers en forme de touches de piano pourrait ainsi être appliqué à des festivals de musique, la forme du “nudge” utilisé devant être bien évidemment cohérent vis-à-vis du contenu de l’évènement. L’humour et l’aspect ludique sont, encore une fois, des notions à privilégier.

L’utilisation des happenings est également un outil à utiliser et répond à la problématique de l’« économie de l’attention ». Le profond déficit d’attention que connaît la société en raison de l’excès d’offre des différents médias par rapport à la demande et aux capacités d’attention des personnes pousse à trouver des solutions innovantes pour capter l’attention des publics. L’utilisation de nouveaux médias comme les webTV ou les web séries peut se révéler efficace à cet effet. La publication de plusieurs vidéos par jour, drôles et correctement montées, le tout avec les moyens de la collectivité, est réalisable, comme cela avait été fait pour promouvoir l’Armada à Rouen. Cela a participé à son succès.

D’autres outils de promotion, plus spécifiques, et donc à externaliser, peuvent être mobilisés. Concevoir l’identité sonore d’un événement peut ainsi faire la différence. Elle fait partie des outils émergents qui peuvent ajouter une véritable plus-value afin d’attirer du monde. L’identité sonore est utilisée pour valoriser les marques et les territoires. Récemment, la ville d’Atlanta a eu recours à l’agence Sixième Son pour élaborer l’identité sonore de son territoire. L’identité sonore se décline ainsi sur différents supports, comme la TV, la radio, le téléphone, le digital ou encore l’événementiel. Cette création d’identité sonore dans le cadre d’un événement (plutôt régulier, par exemple, annuel) permet d’associer ce dernier à une couleur, de le reconnaître plus facilement et de s’assimiler à lui. En effet, le son véhicule des valeurs qui peuvent être reconnues par le public. Sixième Son a créé notamment l’identité sonore de Cap’com : tout au long du forum, on pouvait entendre régulièrement un son avant les annonces sonores, qui caractérise l’événement. Ce même son était présent lors des plénières d’ouverture et de fermeture, ainsi que lors de la remise des prix. Les valeurs de Cap’Com étant le réseau, les contenus et l’exigence professionnelle, selon l’équipe organisatrice, Sixième son a conçu cette identité sonore en respectant ces valeurs, en utilisant donc des instruments patrimoniaux (piano, violons) qu’ils ont arrangé dans un style pop et actuel. Comme a pu l’expliquer Laurent Cochini, « l’identité sonore d’un territoire peut donner lieu à des événements, comme la reprise de la musique utilisée pour l’ADN sonore, par un orchestre symphonique, un quatuor de violons ou un groupe de rock. » On peut émettre l’hypothèse que demain, on utilisera le son via des hauts-parleurs pour faire la promotion d’un événement.

Concevoir l’identité sonore d’un événement peut faire la différence.

La réalité virtuelle a également fait ses preuves dans le domaine de l’événementiel. Ce dispositif, s’il est coûteux, permet d’explorer des lieux qui ne sont pas ouverts au public, ou de revenir sur un évènement majeur sous un angle différent. Ainsi, lors du forum Cap’com 2017, une présentation de la ville du Havre en 360° a été faite avec des casques de réalité virtuelle mis à la disposition du public, dans le cadre des 500 ans du Havre afin de montrer les différentes installations artistiques et le mobilier urbain qui ont été placés dans la ville pendant un certain temps.

Ce mobilier a engendré des coûts qui sont conséquents, mais le prix peut être justifié en rendant pérenne les installations et ainsi donner ainsi une nouvelle dimension au territoire. Programmer un événementiel qui peut durer et s’intégrer au territoire peut être très bénéfique pour la ville et pour son attractivité. L’exemple de la Tour Eiffel, qui devait être démontée, est parlant ainsi que plus récemment les containers d’Un été au Havre évoqués précédemment. En effet, la réussite de l’évènement transparaît dans ce qui dure. Il faut ainsi ne pas hésiter à pérenniser du mobilier urbain, qui permet de rappeler l’évènement et ce qu’il a engendré pour les habitants.

Néanmoins, il ne faut pas oublier de prendre en compte trois aspects de la psychologie sociale : la tendance au statu quo, l’inertie, le conformisme social ainsi que l’aversion de la perte supérieure à l’appât du gain. Bien que les nouvelles technologies soient alléchantes et attirent l’œil, il ne faut pas oublier que leurs effets sont limités et qu’elles peuvent rebuter certains publics.

Une participation des publics auxquels on ne fait pas toujours appel

Pour qu’un événementiel soit relayé, il est bon de faire de plus en plus participer les individus et les acteurs associatifs et économiques locaux en amont : soit dans la mise en place de l’événement, mais aussi pendant, en mettant en place un dispositif interactif. Nous pouvons citer l’exemple de Strasbourg où les habitants se sont pris en photo avec le mobilier urbain et ont ainsi participé à la communication via des concours photos, relayés sur les réseaux sociaux. Ces derniers, combinés à des pré-tests, permettent d’avoir un bon aperçu des représentations des individus sur le sujet et d’avoir une idée de la réception, tout en diminuant le risque de mécontentement. Une option pour réaliser ces pré-tests peut être d’impliquer le public dans l’élaboration, dans la définition et même dans le déroulement de l’événement, le tout par exemple avec des appels à projet ou des jeux concours. Bien sûr cette intervention ne doit pas menacer la faisabilité d’un projet porté par le politique, mais plutôt agir sur les conditions de déroulement de cet événement.

Pour faire participer un public plus large, une option peut être d’organiser des évènements dans des endroits périphériques et ainsi les incorporer aux dynamiques culturelles du centre dans un but de mixité sociale. Cela permet de faciliter l’accès à la culture et de faire participer aux grands moments de la vie locale des individus généralement à l’écart des politiques culturelles du territoire.

Les événements produits peuvent ainsi participer renforcer les dynamiques d’inclusion sociale. L’évènement doit pouvoir parler à l’ensemble des groupes sociaux. Il faut également garder en tête ce qu’a pu dire Pascal Perrineau, pour qui « les communicants ont contribué à invisibiliser certaines catégories sociales », et tenter d’atteindre la population dans sa globalité.

L’évènement doit pouvoir parler à l’ensemble des groupes sociaux.

Cette participation peut passer par des partenariats avec des acteurs ou groupes citoyens (associations, maisons de quartiers etc) autour de l’organisation d’un projet. Selon le type d’événement, de multiples partenariats peuvent être passés, permettant à la ville de réduire les coûts d’organisation et de mise en place d’un projet, de bénéficier de supports de communication supplémentaires à moindre coût, ou encore d’étendre la visibilité de l’événement et donc le public potentiellement touché. Ainsi, pour élargir les cibles et amortir les coûts, la collaboration avec d’autres collectivités est envisageable. L’événementiel sera ainsi le fruit d’une entraide logistique et de moindres coûts pour chaque acteur en termes de financements et de communication, tout en permettant d’élargir le spectre de communication.

Des partenariats public/privé peuvent être également très intéressants. Ainsi, dans le cas des bibliothèques municipales, fer de lance de la politique du livre de la ville, des partenariats avec les librairies peuvent permettre plusieurs choses. D’abord de réduire les dépenses liées à l’achat de livres, mais aussi de soutenir des opérations « hors les murs », telles que « Lire à la Plage » un évènement instauré par la ville du Havre et son réseau de librairies, qui a pour objectif de désacraliser le livre et le lieu (les librairies). Les acteurs privés, culturels et associatifs de la ville peuvent aussi œuvrer au renouvellement des politiques culturelles et à plus d’originalité dans l’élaboration d’événements (ex dans le cas des bibliothèques, avec les ludomobiles). Des concerts, expositions ainsi que des lectures publiques peuvent investir les bibliothèques de manière éphémère et itinérante, dans le but de toucher une part plus large de la population, et notamment celle qui n’est pas spontanément en contact avec les bibliothèques.

Le fait d’inclure divers acteurs permet de renouveler les sources de financements, qui sont de fait plus diverses aujourd’hui (crowdfunding, mécénat public et privé…), permettant ainsi de s’inscrire dans les problématiques de gouvernance locale, qui prennent une importance croissante et visent à impliquer de plus en plus d’acteurs. On peut solliciter des associations, écoles, des entreprises, des centres culturels, etc. Leur participation n’est pas que financière, mais peut se faire en termes d’espaces, en tant que supports de communication, comme partenaires dans la logistique de l’évènement.

Il semble également fondamental d’inclure les commerçants et acteurs économiques locaux, réunis notamment au sein de la Chambre de Commerce et d’Industrie locale, afin de favoriser l’acceptabilité du projet et de soutenir son organisation. L’exemple d’Un été au Havre est sur le sujet assez parlant. Trois types d’acteurs ont été mobilisés : les commerçants, les TPE/PME et les grandes entreprises. En effet, 1000 des 2000 commerçants havrais ont participé à l’événement, ce qui est un record à l’échelle de la ville. L’enjeu était important et cette collaboration a permis de fédérer. Le rôle de ces commerçants était de créer une dynamique d'animation, et il ne leur a pas été demandé d’investissement financier. Ils ont pu y trouver leur compte en s’affirmant comme de vraies forces de proposition, le tout combiné à une vraie démarche d'accueil pour les visiteurs. En revanche, il fut demandé une contribution aux TPE/PME, à hauteur de leurs moyens. Ainsi, pour le Havre, un budget d'environ 150 000 € a été dégagé, ce qui a permis de parrainer une œuvre, « Couleurs sur la plage » (mise en couleurs des cabanes). Ces cabanes ont ensuite été mise à disposition de ces entreprises, leur permettant de les utiliser dans le cadre de relations publiques soit avec des clients, soit lors d’opérations interne avec leurs salariés. Enfin, fut créé un « club des grands mécènes » pour les grandes entreprises, comptant quarante membres, le budget dégagé était important (1 million d’euros) et a pu financer un projet pérenne pour redynamiser un bassin du port. Ainsi, les grands groupes ont compris l’utilité de soutenir des événements et ont profité de la dynamique culturelle autour de cette mobilisation. Tous ont compris qu’il était bon pour le territoire et l’attractivité de s’engager dans des projets culturels. Au total, Un été au Havre a mobilisé 20 millions d’euros dont ¾ issus du financement public et ¼ récolté du mécénat privé.

3ème étape : évaluer l’impact de l’événement

L’évaluation n’est pas une mince affaire et ne doit pas être oubliée. Penser à l’après évènement revient à observer la pérennité de l’opération, ses impacts sur le public, l’attractivité du territoire et le renforcement de son identité. Il faut ainsi essayer de pérenniser l’implication des citoyens et des acteurs locaux en évaluant l’effet de l’évènement, notamment sur eux.

Les KPI : élaborer des indicateurs

Dans la perspective d’une évaluation de l’événement, les KPI (Key Performance Indicator ou indicateurs clé de performance) se révèlent être d’une grande utilité. Ils permettent de voir si les objectifs fixés avant l’organisation de l’événement ont été correctement remplis. Il s’agit d’élaborer des indicateurs de deux natures : quantitatifs et qualitatifs. Les critères quantitatifs peuvent comprendre le nombre d’acteurs qui ont été nécessaires à l’organisation de l’événement, le nombre de participants, les différents partenariats établis pour l’occasion, le budget qui a été dépensé, ainsi que les profits en termes de tourisme, de commerce, voire de création d’emplois pour les événements récurrents. Ce sont des critères qui permettent d’évaluer l’impact de l’événement à court et moyen terme, et ainsi d’adapter la stratégie culturelle/évènementielle future. Les critères qualitatifs permettent de mesurer l’appréciation du public ainsi que celle des journalistes, voire critiques (dans le cas d’un concert, d’un spectacle ou d’une projection cinématographique). Parmi eux, les retombées médiatiques permettent de voir si ces objectifs ont été respectés.

Retombées médiatiques

Un autre outil réside dans une revue de presse, qui permet de se rendre compte de l’ampleur des retombées, en fonction des indicateurs de réussite préétablis. Cela permet ainsi de faire un retour aux habitants s’étant impliqué, de se mettre en valeur auprès des investisseurs et des citoyens, de mesurer l’évolution de réputation, d’adapter son message en fonction de la réception reçue et d’adopter une vision globale. Cette veille peut ainsi être réutilisée comme une carte de visite : un pressbook peut être créé à cette occasion et rendre compte du succès de l’événement, ou encore de promouvoir un prochain événement de même nature. À Épernay, les « Habits de Lumière » sont organisés chaque année et rassemblent plus de 40 000 personnes pour profiter d’animations gratuites (festivités nocturnes, des dégustations et une parade automobile). Les retombées médiatiques ainsi que le bilan de l’événement aident à promouvoir l’édition suivante, et notamment à appuyer, en interne, la décision de le reconduire.

Évaluation sur le temps long

Les post-tests de communication permettent de mesurer l’impact de la campagne : il s’agit tout d’abord de savoir si elle a été vue. En fonction de leur originalité, certaines campagnes peuvent passer inaperçues. Dans un deuxième temps, on s’interroge sur l’adhésion, sur l’appréciation vis à vis de cette campagne. Des baromètres locaux sont utilisés, notamment sur la notoriété des élus, la connaissance des politiques publiques, l’adhésion aux projets. Tous les ans, le baromètre des grandes villes permet de se situer par rapport aux autres et permet de se positionner. C’est la valeur évolutive qui est intéressante. L’étude locale coûte cher, contrairement à l’étude nationale, de ce fait plus intéressante. Ceci dit, on ne peut pas se satisfaire entièrement de ces post- tests car ils sont très subjectifs : il s’agit surtout de savoir si la campagne a été vue, mais pas si elle a été comprise et encore moins appréciée.

Une évolution de l’image du territoire, conformément aux objectifs fixés indique que la campagne était positive, efficace. La vraie évaluation est celle-ci. En fonction des objectifs, les campagnes s’inscrivent sur de la plus ou moins longue durée : localement, les objectifs peuvent être atteints et l’image corrigée de manière rapide. En deux-trois ans l’image locale se reforme alors que cela prend six ou sept ans pour l’image nationale. L’impact d’un évènement doit donc s’appréhender sur plusieurs mois, voire plusieurs années en cas de récurrence.

Pour conclure cette recommandation, nous reprendrons cette phrase de Jean Blaise lors de sa conférence « Ré-enchanter la ville » au sujet de son film Voyage à Nantes : « la commande doit être en accord avec le terrain et doit être juste et sincère ».