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Ce qui fait la force d’un logo

Publié le : 2 février 2016 à 16:46
Dernière mise à jour : 22 mars 2018 à 09:02
Par Cap'Com

Nous assistons depuis quelques mois à une floraison de nouveaux logos de collectivités locales. Les redécoupages institutionnels comme les nouvelles équipes élues en sont le terreau. Mais dans le contexte de restrictions budgétaires, la créativité est-elle au rendez-vous ? Car l’exercice est difficile et particulièrement marquant. Osons un regard sans concession sur des créations récentes avec l’idée de mieux comprendre ce qui fait la force d’un logo.

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Les régions redessinées, les métropoles et intercommunalités naissantes, tout comme l’arrivée de nouvelles équipes à la tête des communes et plus récemment des département et régions, expliquent la floraison actuelle de nouveaux logos. Ces créations dessinent-elles une tendance ? Ont-elles la qualité souhaitée ? Ne sont-elles pas réalisées dans une trop grande précipitation qu’imposent élus et actualité ? Ne souffrent-elles pas de trop faibles moyens consacrés à la réalisation d’une identité pourtant essentielle et durable ?

Avant de modifier un logo existant trois questions doivent être posées : Pourquoi changer ? Quoi changer ? Comment changer ? Et, comme l’a rappelé Benjamin Béchaux, directeur de la communication de la ville de Lille, lors d’un des atelier du Forum Cap’Com à Tours en décembre dernier, il y a différentes choses à éviter pour ne pas échouer notamment « mal évaluer l’ampleur du projet, vouloir tout changer du jour au lendemain, vouloir politiser le sujet alors que l’identité reste bien au-delà d’un mandat politique, louper le volet créatif et ne pas se préparer aux débats inévitables ».

Changements utiles ou inutiles, intéressants ou affligeants

Le regard sur les logos qui émergent actuellement est fort décapant. Donnons la parole à des graphistes en les autorisant à apprécier, à partir d’une dizaine de créations très récentes, le résultat du travail de communicants et de certains de leurs confrères d’agence. Remercions Barbara Wülfken, Ruedi Baur, Marc Dubreuil et Xavier de Fouchécour, qui tous participent au réseau Cap’Com, de s’être prêtés à cet exercice osé et difficile. Ces regards sans concession permettent indéniablement de mieux comprendre ce qui fait la force d’un logo. « Changements utiles ou inutiles, intéressants ou affligeants, cette analyse d’une série de nouveaux logotypes représentant un certain nombre de collectivités territoriales françaises, explique Ruedi Baur, peut relever de différents critères, mais l’addition de ceux-ci peut permettre de juger de la pertinence de ces remplacements. »

Si certains logotypes répondent aux contraintes d’autres laissent à désirer

Ruedi Baur

Selon Ruedi Baur, on peut d’abord juger de la qualité fonctionnelle des propositions en analysant leur lisibilité, leur visibilité, leur capacité de réduction, d’agrandissement, de reproduction en noir et blanc, au trait, sur un fond couleur, leur capacité d’animation. « Si certains logotypes répondent aux contraintes d’autres laissent à désirer ». Le deuxième jugement pourrait relever de la pertinence de la transformation et du progrès ou du recul effectué. Pour le designer, une étude plus précise permettrait peut-être de faire aussi ressortir des faiblesses typographiques, du non-sens par rapport à l’histoire et à la sémiotique des lieux. « Je suis persuadé, se désole Ruedi Baur, que nous nous trouvons toujours dans cette misère de la représentation des collectivités publiques que nous avons décrit dans notre livre Face au brand territorial. Je suis persuadé qu’ils participent plus qu’on ne le pense au désamour des Français par rapport au politique et plus largement aux institutions de la République qui devraient les représenter comme citoyens dignes et responsables ».

Un pari graphique audacieux ne réussit pas toujours

Mais pour sortir de cette impression de « misère » des logos publics, n’oublions pas, comme l’explique Xavier de Fouchecour, qu' « en matière de logo, le plus simple est toujours préférable. C’est un gage d’efficacité, de lisibilité et de pérennité. On oublie souvent qu’un logo se "charge" de sens une fois créé. Vouloir lui faire dire trop de choses avant est une erreur. Pour autant, un logo doit quand même "dire" quelque chose. C’est un équilibre subtil ». « Simplifier son logo est souvent très bénéfique pour améliorer sa lisibilité, confirme Barbara Wülfken, et réduire tous les effets graphiques à leur plus simple expression fait partie des défis qu’il n’est pas facile de réussir : mais il ne s’agit pas de confondre un design simple et percutant avec un design « simplet » et banal ».

Simplifier son logo est souvent très bénéfique pour améliorer sa lisibilité

Barbara Wulfken, les Giboiulées

« Il faut faire confiance à l’histoire de son territoire, poursuit Barbara Wülfken, et rien de mieux que de regarder le vieux blason qui a été souvent abandonné, mais qui enferme dans son dessin une partie de cette histoire. Mais attention « vouloir actualiser son blason ou simplement vouloir rajeunir son logo en le mettant au goût du jour, c’est un pari graphique audacieux qui ne réussit pas toujours », constate-t-elle.

« Innover sans sacrifier la signification, telle est la direction à prendre selon Barbara Wülfken qui invite à sortir des sentiers battus, à partir dans la recherche graphique sans oublier la signification que doit véhiculer un nouveau logo pour tous ceux qui devront partager et revendiquer ce signe pendant de nombreuses années. « Les changements radicaux sont parfois que partiellement salutaire », prévient Marc Dubreuil. Il y a en effet parfois « une perte de cohérence et de sens ». « Oser l’innovation est courageux, la réussir est encore mieux », ajoute Barbara Wülfken.

Quatre regards personnels sur dix créations de logotypes récents

Barbara Wülfken, directrice de l'Atelier des Giboulées, agence de création et de communication publique qui accompagne notamment la communication de Cap’Com et réalise l’identité graphique des Forums.

Ruedi Baur, graphiste - designer au sein de l’atelier Intégral Ruedi Baur de Paris et Zurich et du laboratoire d'expérimentation visuelle le Labo IRB. Intervenant régulier au sein du réseau Cap’Com, il a notamment été l’invité du débat « Graphisme, tendances et créativité » du Forum 2012 de Montpellier, et des 2e Rencontre du marketing territorial à Lyon en 2014.

Marc Dubreuil, directeur associé d’Epiceum, agence de conseil en communication dédiée à l’intérêt général qui, avec Cap’Com, porte le Baromètre de la communication locale et le Baromètre de la communication intercommunale et qui travaille notamment sur les marchés publics de communication.

Xavier de Fouchécour, directeur de Beaurepaire, agence de conseil en communication. Membre du Comité de pilotage de Cap’Com, il a notamment été, lors du dernier Forum de Tours, l’animateur du débat « Faut-il faire du marketing public ? ».