Aller au contenu principal

30 ans de com publique vus par Anne-Caroline Poincaré

Publié le : 28 août 2018 à 17:12
Dernière mise à jour : 20 septembre 2018 à 10:53
Par Pierre Geistel

Voilà presque 25 ans qu'Anne-Caroline Poincaré, actuellement dircom de la ville de Guyancourt, suit les aventures de Cap'Com. À l'occasion des 30 ans du Forum, elle pose son regard sur les évolutions du métiers, ses défis et nous livre au passage quelques confidences de communicante...

Dans les mêmes thématiques :

Après l’école, EFAP option communication publique, Anne-Caroline Poincaré intégra l’agence Legris, chargée des relations publiques et des relations presse pour des clients de l’industrie et de la viticulture. À l’agence Sagacité, filiale du groupe JCDecaux spécialisée dans la communication publique, elle se rapproche de son métier actuel comme chef de publicité puis directrice de clientèle. Elle est aujourd’hui directrice de la communication de la ville de Guyancourt, dans les Yvelines, au service de 30 000 habitants et 1 000 agents territoriaux.

Cette interview inaugure la publication d'une série d'entretiens de communicants publics "30 ans de com publique vus par..." menés à l'occasion de la 30e édition du Forum Cap'Com par Pierre Geistel, ancien chargé de communication, et par Philippe Lancelle, directeur du tourisme de la région Bourgogne Franche-Comté, tous deux membres du comité de pilotage de Cap'Com.

30 ans de com publique vus par...
Lire la suite

La com publique a beaucoup évolué depuis 30 ans. Quels sont les changements qui ont marqué le métier depuis ces années ?

En trente ans, il y a eu évidemment une énorme « professionnalisation de la profession » des dircoms. Les pionniers étaient souvent d’anciens journalistes qui avaient tendance à communiquer beaucoup par le magazine et les relations presse.

Avec l'arrivée de nouveaux supports – et avant même l'avènement du numérique – le dircom a appris la polyvalence, à la fois stratège, technicien et manager. Les équipes se sont structurées comme des agences, intégrant tous les métiers, de l'écriture à la création, de l'événementiel au webmaster...
Bien évidemment, l'ère du numérique a le plus changé nos façons de travailler et de communiquer. Ce qui n'a pas forcément fait évoluer en lui-même le métier de directeur de la communication.

Dernière évolution de plus en plus présente dans nos missions actuelles : la communication interne.

Je suis entrée à mon premier Forum Cap'Com, au siècle dernier, par une porte de secours....

Voilà presque 25 ans que je suis les aventures de Cap'Com et je profite de ce témoignage pour confesser être entrée à mon premier Forum, au siècle dernier, par une porte de secours.... J'y ai vu beaucoup d'évolutions, mais j'ai l'impression que certains sujets perdurent.

J’en citerai deux : la difficulté de faire reconnaître nos métiers au sein de la fonction publique territoriale et l'éternel débat autour du rattachement hiérarchique d'une DIRCOM : cabinet ou direction générale des services ?

Dans les 10 prochaines années quels sont les défis auxquels la com publique risque d’être confrontée ?

L'équilibre entre le papier et le numérique est déjà au cœur de nos préoccupations et la solution n'étant pas scientifique, il sera encore dans nos débats de demain. Le papier résistera sans aucun doute, différemment, mais résistera. Et l'évolution numérique continuera.
Le développement de chabot ouvre de nouvelles façons de communiquer, surtout si ce robot de conversation devient vraiment performant. Celui que nous avons testé sur notre site nous a laissé sur notre faim…
Le fait que chaque citoyen soit un émetteur potentiel nous oblige à bien gérer ce flux d'informations : se créer des règles, vérifier les sources encore plus, coordonner les messages...

La communication interne constitue un des challenges : indissociable de la communication externe.

La communication interne constitue un autre challenge : indissociable de la communication externe, elle est déjà en place dans les grandes collectivités. Elle reste souvent à instaurer ou à structurer dans les moyennes et les petites. Il s’agit de la mettre en œuvre, de lui donner du sens et à l'adapter aux différents métiers, grades et filières. Aujourd'hui, les agents, comme les citoyens, souhaitent participer. Derrière ce mot, il n'est pas évident qu'ils sachent quoi faire ni comment s'impliquer. C’est un beau défi.

Dans l’exercice de votre métier, quel est votre meilleur souvenir ?

Quand on a commencé sa carrière à l'époque du télex, des bromures et des cromalins, difficile de n'en dégager qu'un seul...

J'ai piloté des rencontres avec de agents volontaires pour une nouvelle communication interne. Un beau moment d'échange et de partage.

Par exemple, avec la direction des Ressources Humaines, j’ai piloté des rencontres pour écouter des agents volontaires (206 en tout) et tenter de construire une nouvelle communication interne. C'était un beau moment d'échange et de partage qui se poursuit dans la durée.

Dans un tout autre registre, j'ai un très beau souvenir du travail réalisé avec des agents municipaux de la ville de Comè au Bénin (95 000 habitants, 56 agents municipaux et… 15 élus !) dans le cadre d'une coopération décentralisée. Je les ai accompagnés dans l'élaboration d'un plan de communication pour la mise en place du Registre Foncier Urbain, sorte de PLU dont un des objectifs étaient de prélever pour la première fois l'impôt !

Ces échanges ont été passionnants et le restent sur d'autres sujets aujourd'hui. Il faut savoir faire preuve d'imagination pour comprendre qu’au Bénin, l'un des principaux outils de communication est le crieur... qui déambule dans les quartiers pour diffuser l'information !

On devrait pouvoir prendre autant de recul chaque fois qu'on élabore un plan de communication, mais on a, malheureusement trop souvent, le nez dans le guidon.

Et le moins bon ?

Pas sympa de me faire remémorer un mauvais souvenir...

Deux mois après mon arrivée dans la collectivité, il a fallu organiser une opération de mi-mandat : 7 événements en une seule journée et, surtout, 7 cartons d'invitation différents. Le tout à réaliser en un temps record, un pléonasme, je vous l'accorde, en matière de com.

Sur les sept cartons d'invitation, on a compté sept fautes différentes.

Sur les sept cartons, on a compté sept fautes différentes : erreurs de lieu, d'invitant, d'heure, coquille typographique... On les a découvertes au fur et à mesure des livraisons. À chaque fois, je croyais qu'on me faisait une blague, une épreuve de bizutage… Mais non, c'était bien vrai ! Quand ça dérape, ça dérape.

Si vous aviez à conseiller un étudiant qui veut se lancer dans la com publique, que lui recommanderiez-vous et pourquoi ?

S'intéresser vraiment à ce qu'est le service public ! La communication qu'il aura à réaliser ensuite sera plus efficace. Il faut comprendre le fonctionnement des politiques publiques, leurs enjeux et ajouter à cela, plus dans la territoriale que, sans doute, dans la fonction d'État, la volonté politique des élus.

Un conseil à un étudiant qui veut se lancer en com publique : s'intéresser vraiment à ce qu'est le service public !

Il faut s'armer de patience pour travailler avec une multitude de collègues et de partenaires. Comprendre les rouages d'un organisme, mais c'est aussi valable dans le privé. Enfin, être intéressé par tous les thèmes, sauf par l'argent, parce que ce n'est pas pour le salaire qu'on fait ce métier. On passe d'un sujet d'aménagement urbain à un point d'éducation, d'un spectacle culturel à une aide sociale, d'un débat sur la citoyenneté à l'arrivée du RIFSEEP, le nouveau régime indemnitaire des agents... Et on se passionne très vite !