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La question de la démocratie nous est posée

Publié le : 18 janvier 2019 à 08:07
Dernière mise à jour : 24 janvier 2019 à 13:06
Par Alain Doudiès

Parfois, l’Histoire nous met les yeux en face des trous. Ainsi, le mouvement des « gilets jaunes ». Confus et contradictoire dans ses revendications, incertain voire inquiétant dans ses suites, il pose radicalement, hors du débat public habituel, mais de manière fondamentalement politique, la question de la démocratie.

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Par Alain Doudiès, consultant en communication publique, ancien journaliste, membre du Comité de pilotage de Cap’Com

La question sociale s’est progressivement déployée en question démocratique. Sur le mode négatif (« Moins de députés », « Suppression des privilèges des élus » et aussi, comme une lame de fond qui balaye le train-train institutionnel, de façon positive, « République participative », « Davantage de référendums ». Trois lettres ont fait irruption dans l’espace public, R.I.C., référendum d’initiative citoyenne.

Alors, ouvrons les yeux, ouvrons-les complètement. Face à la défiance à l’égard des institutions et des élus, enracinée depuis longtemps dans l’opinion, nous n’avons pas été aveugles. Le baromètre annuel de la confiance politique du CEVIPOF et ses chiffres plus qu’alarmants nous est familier, alors que beaucoup de commentateurs viennent de le découvrir. À Cap’Com, nous avons étudié le phénomène et avancé sur ce terrain accidenté, notamment par des initiatives tendant à réduire l’abstention.

À nous de regarder en face ce qui dans nos pratiques, dans notre positionnement, dans le confort de nos vies professionnelles, dans une certaine bonne conscience, est, de fait, contesté.

Aujourd’hui, d’une France qui nous est souvent plus ou moins lointaine, surgissent des interpellations qui nous concernent. Il serait irresponsable de renvoyer une fois de plus la balle au gouvernement et aux élus. La question de la démocratie nous est posée. À nous d’y apporter notre part de réponse. À tenter de le faire, du moins. En regardant en face ce qui dans nos pratiques, dans notre positionnement, dans le confort de nos vies professionnelles, dans une certaine bonne conscience, est, de fait, contesté.

Si, modestes mais déterminés, nous sommes des fantassins de la démocratie, la démocratie locale notamment, nous devons affronter une série de questions. N’est-il pas temps de remettre la politique - au sens le plus beau du mot - à sa place, comme une des raisons d’être de nos métiers ? N’est-ce pas le moment de cesser de fuir dans la fascination qu’exercent les outils, numériques et autres ? Ne devons-nous pas, comme un des débats du Forum de Lyon l’a souligné, prendre ou reprendre du pouvoir, au sein des collectivités, en nous dégageant de l’enfermement dans les fonctions de production ? Nous en avons la légitimité par notre engagement même, par nos compétences, notre capacité à écouter et comprendre la société, nos expériences dans diverses formes de régénération de la démocratie. Y compris, les démarches de « démocratie participante », avec leurs avancées, faux-semblants… et impasses.

Vaste chantier. Le Baromètre de la communication locale nous le rappelle. Certes il nous donne quelques motifs de satisfaction. Mais il redit que les « loco’distants », qui n’utilisent qu’un ou aucun moyen d’information émis par les collectivités locales, représentent 29 % des personnes interrogées. Près d’un Français sur trois très peu touché ou hors d’atteinte. N’est pas une question de citoyenneté qui nous est ainsi décochée ?

Voilà, me semble-t-il, sans en rajouter dans l’exaltation lyrique, où est notre responsabilité.