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Forum Cap'Com : la politique au vestiaire ?

Publié le : 2 décembre 2021 à 07:07
Dernière mise à jour : 2 décembre 2021 à 15:03
Par Vincent Lalire

À quelques jours du Forum Cap’Com de Rennes, peut-on oser la question délicate de la couleur politique qui dominera ce grand rendez-vous annuel qui réunit près d’un millier de professionnels de la communication publique territoriale ? Plus prosaïquement, les pros de la compublique penchent-ils plutôt à droite, à gauche, au centre ou aux extrêmes ?

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Par Vincent Lalire, responsable de la communication interne du département de la Seine-Maritime.

Se lancer dans la sociologie électorale d’une branche professionnelle relève pour le moins, je l’admets, d’une gageure. Y aurait-il un déterminisme idéologique qui nous conduirait à exercer le métier de communicant public lorsque d’autres exercent celui d’attaché parlementaire, de médecin, de géologue ou de boulanger ? L’histoire a montré qu’attacher une profession – prenons celle de banquier, par exemple – à un groupe d’individus relève de la plus abominable des dérives. Cela arrive pourtant encore trop souvent, notamment de la part d’adversaires du président de la République sortant. Mais passons.

Ce préalable étant précisé, que donnerait un sondage grandeur nature – lors d’une plénière du Forum, par exemple – des intentions de vote des « Cap'Commiens » pour la prochaine élection présidentielle ? Imaginons la scène…

Premier scénario : une majorité de participants du Forum, levant librement la main, confirmerait ce que tous les instituts de sondages prédisent : à savoir une droitisation de l’électorat français. Peu importe le candidat – enfin presque –, les Cap'Commiens traduiraient eux aussi une appétence certaine pour le libéralisme, une adhésion aux vertus du capitalisme porteur de développement économique et un attachement évident à quelques valeurs traditionnelles ou morales de notre pays. (Je fais court.) Rien d’anormal à un tel vote. On l’expliquerait peut-être, assez simplement, trop simplement, par un conservatisme bon teint.

Second scénario : une majorité de participants, levant toujours librement la main, se prononcerait en faveur de l’un des (nombreux) candidats de gauche. Ils traduiraient ainsi, a contrario de ce qui semble être donc aujourd’hui l’opinion dominante des Français, une proximité idéologique vers les valeurs de justice sociale, une volonté de protéger plus fortement notre environnement et le souhait de nouvelles avancées sociétales. Là encore je caricature, et là encore il n’y aurait rien d’anormal à un tel vote. On l’expliquerait peut-être, assez simplement (trop simplement), par une culture de service public, historiquement plutôt ancrée à gauche.

Et après… ? Quelle serait l’ambiance du Forum après un tel sondage ? Les professionnels de la compublique se regarderaient-ils dans le blanc des yeux avec suspicion ? Choisiraient-ils d’organiser leurs tablées du midi en fonction de leurs affinités politiques ? Danseraient-ils le soir venu avec les seuls représentants de leurs courants de pensée ? Eh bien, il existe chaque année un petit miracle à Cap’Com dont on ne parle pas assez et que je souhaitais évoquer ici.

Alors qu’ils figurent certainement parmi les moins abstentionnistes des Français (et Dieu sait qu’ils sont nombreux), alors qu’ils ont le goût de la politique chevillé au corps, alors qu’ils servent par définition des élus fortement marqués politiquement, les Cap'Commiens sont des pacifistes de l’opinion. Le drapeau blanc de nos convictions intimes flotte dans les couloirs de Cap'Com comme un étendard d’ouverture d’esprit, plutôt qu’au nom d’une galvaudée bienveillance que l’on nous sert à l’envi.

Est-ce à dire que nous, communicants publics, laissons la politique au vestiaire ? Que nous l’abandonnons à l’aune d’une diplomatie de congressistes ? Assurément non ! De politique, nous parlons énormément parce qu’elle nous anime. Parce que nous en mesurons – peut-être plus que d’autres – la dimension universelle, porteuse de démocratie et de progrès. Parce que nous, médiateurs de la parole publique, nous constatons que cette parole est parfois difficile à traduire pour le citoyen. Parce que nous, passeurs de la chose publique au quotidien, nous estimons qu’il n’y a rien de pire et d’odieux que d’amalgamer, caricaturer, réduire « l’autre » à néant parce qu’il ne pense pas la même chose que nous, qu’il est différent de nous, qu’il vient d’un autre continent, d’une autre culture, ou que la consonance de son prénom est étrangère ; parce que « iel » est une femme, un homme, ou ne se reconnaît dans aucun stéréotype de genre, est hétérosexuel, homosexuel, lesbienne, queer, trans, réfugiée, breton, normand, occitan... Comment ça, on ne parle pas de politique à Cap'Com ? Rendez-vous à Rennes !