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Élection présidentielle : les réseaux sociaux fossoyeurs du débat ?

Publié le : 14 avril 2022 à 06:32
Dernière mise à jour : 14 avril 2022 à 12:34
Par Marc Cervennansky

Quel rôle ont joué les réseaux sociaux dans la campagne présidentielle en cours ? Les candidats ont tous cherché à élargir leur audience via le truchement des influenceurs et autres leaders d’opinion populaires. Un moyen de mobiliser les abstentionnistes ou d'appauvrir le débat démocratique ?

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Par Marc Cervennansky.
@cervennansky

Ça y est, nous savons qui sera en finale pour le second tour de l'élection présidentielle.
74 % des français ont apporté leurs suffrages au premier tour, le 10 avril. Un des enjeux de ces élections est bien le taux de participation, qui s’érode depuis plusieurs années et qui interroge sur l’état de notre démocratie. Point d’analyse politique ou sociologique ici. C’est le travail des politologues et des sociologues. Nous allons parler de la manière dont les personnalités politiques se sont adressées aux Français.

2022 a marqué une évolution notable : la manière dont les candidats ont choisi de communiquer, plus particulièrement auprès de ceux qui ne votent pas, les jeunes.

Historiquement animés par les journalistes, les débats et interventions des prétendants à la fonction présidentielle ont vu de nouveaux arrivants investir le terrain médiatique : les youtubeurs, les « pure players » numériques et les influenceurs sur les réseaux sociaux.

Toucher ceux qui se désintéressent de la politique

Lors d’un déplacement durant sa campagne, la candidate Anne Hidalgo a ainsi ostensiblement ignoré les journalistes pour accorder un tête-à-tête à l’influenceuse Magali Berdah. Égérie de la télé-réalité la plus vulgaire, elle capitalise sur Instagram plus d’1 million d’abonnés.

Car l’enjeu est bien là : comment, par l'intermédiaire des médias sociaux, toucher ceux qui se désintéressent de la politique. La campagne présidentielle s’est caractérisée par cette nouvelle peopolisation : sortir du cadre politique traditionnel pour jouer la proximité, la connivence. La campagne a ainsi adopté les codes et le rythme de la télé-réalité et des réseaux sociaux.

Moins de place pour le débat d’idées, plus de phrases courtes, de clichés, de punchlines. Nous sommes dans l'air du buzz et du zapping. La politique s’adapte : il s'agit de rendre la politique « sexy ». Au détriment des sujets de fond, de la réflexion… de l’intelligence ?

« Tel candidat est cool, il a l’air sympa. » Mais quid de ses idées, de son projet de société ? Les influenceurs questionnent mais ne s’inscrivent jamais en faux. Pour les politiques, c’est plus confortable que d’affronter un potentiel contradicteur. Et surtout, s’exprimer sur les chaînes des influenceurs, c’est potentiellement toucher les 18-24 ans, des primo-votants pour qui les réseaux sociaux sont la première source d’information.

Décrypter le programme des candidats

Mais ne tombons pas dans la caricature. Non, les réseaux sociaux ne sont pas les fossoyeurs de la démocratie. Pas plus et pas moins que les traditionnels débats radio ou télévisés qui depuis longtemps déjà se repaissent des joutes verbales entre candidats.
Certains font le job, sur les réseaux sociaux. Grâce à des formats innovants, ils permettent à leurs abonnés de décrypter les programmes des candidats. Voyez les séries publiées sur Instagram par Konbini, Brut, Hugo décrypte.

Sur la plateforme de streaming vidéo Twitch, Franceinfo teste avec le chroniqueur Clément Viktorovitch un nouveau format pour intéresser les jeunes à la politique : Game Of Rôles - Les Deux Tours. Pendant plus de trois heures, quatre candidats s’affrontent dans un jeu de rôles animé par un « maître du jeu » qui leur propose des choix. Des débats ponctuent chaque live et des votes sur Twitter désignent la personne la plus convaincante.

Il sera intéressant dans quelques mois, à l’issue des élections présidentielle et législatives, d’analyser la portée réelle de ces nouvelles formes de communication politique sur les médias sociaux. Auront-elles contribué ou pas à l’intérêt des Français et des plus jeunes d’entre eux à l’avenir politique du pays ?