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Élections professionnelles : forte communication, faible participation

Publié le : 14 décembre 2018 à 15:15
Dernière mise à jour : 3 avril 2019 à 09:03
Par Bernard Deljarrie

Les élections professionnelles ont fortement mobilisé les communicants internes de la fonction publique, mais pas suffisamment les agents qui ont trop peu voté. La faute à qui ?

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5,2 millions d’agents publics étaient appelés à choisir leurs représentants du personnel siégeant dans les organismes consultatifs de la fonction publique (Comités Techniques, Commissions Administratives Paritaires, Commissions Consultatives Paritaires) pour un mandat d’une durée de quatre ans. La participation s’est révélée inférieure aux années précédentes, 49,9 % pour les Comités Techniques (CT), contre 52,8 % en 2014 et 54,6 % en 2010.
Au sein de la fonction publique territoriale, le taux de participation est légèrement supérieur aux résultats de la fonction publique de l’État et hospitalière mais en baisse de près de 10 points depuis 2002.
À noter que les résultats sont très inégaux selon les organismes, la participation pouvant se limiter à 30 % comme au ministère de l’Enseignement supérieur (34 %) ou s’élever à plus de 60 % comme au sein, par exemple, du département du Puy-de-Dôme.

Une information abondante utilisant tous les supports

Aux côtés de l’information des syndicats, la communication interne des organismes publics avait reçu la mission de promouvoir la démocratie sociale et la mise en œuvre du droit de participation des agents à la détermination des règles individuelles et collectives qui les concernent. Les communicants internes se sont donc fortement mobilisés. Et ils ont été particulièrement nombreux à dialoguer sur la mail liste interne de Cap'Com pour échanger sur leur stratégie, leurs outils mais aussi pour comparer les résultats de leur collectivité.

À Issy-les-Moulineaux, les communicants publics se sont appuyés sur le kit de communication proposé sur le portail de la Fonction publique. La ville a aussi largement utilisé l’intranet notamment pour créer un compte à rebours. De plus, « une lettre signée dumaire avait été jointe aux bulletins de paie de novembre envoyés à domicile et deux publications faites dans le journal interne, dossier du mois de juillet et article "mode d’emploi" en novembre ». Cela s’est traduit par une participation des agents de la ville de 53 % contre 44 % en 2014 mais 59 % en 2008.

D’autres villes, comme celle du Mans, enregistrent un faible niveau de participation (47 %) malgré une forte communication. « Nous sommes en perte de 5 points par rapport au précédent vote, quand bien même nous avions déployé un dispositif de communication important et proposé le vote par internet, avec accès direct depuis l'intranet pendant la semaine et le vote à l'urne le jour J ».

Les effets contrastés du vote électronique

Certains syndicats n'hésitent pas à expliquer que cette forte baisse de la participation est due au recours au vote électronique. Une analyse qui repose notamment sur le constat que dans les ministères, comme celui de l’Éducation nationale, où le vote était exclusivement électronique, la participation a été nettement plus faible que dans les autres. C’est bien là une particularité de ces élections qui se déroulent selon des modalités différentes. Certains organismes optent pour le vote par correspondance, d’autres par voie électronique, d’autres encore par bulletin dans l’urne. Certaines font un mix des différents procédés ou réservent la possibilité à une partie des agents de voter par correspondance alors que d’autres doivent voter sur l’intranet ou se déplacer.

Mais la relation entre les modalités du vote et la participation reste à démontrer. "Vote électronique ou papier, l’impact sur le taux de participation n’est pas avéré", analyse sur la mail liste Cap'Com une communicante qui a dressé une comparaison entre 25 collectivités locales. Par exemple, au département du Bas-Rhin, le vote était uniquement possible en ligne et le taux de participation est en légère progression par rapport au scrutin précédent. Au sein du département du Puy-de-Dôme, où le vote a été aussi exclusivement en ligne, le taux de participation tous types de scrutins confondus atteint 60 %. En revanche, en Meurthe-et-Moselle, où le département a aussi opté pour le vote en ligne intégral, la participation moyenne y est en forte baisse par rapport à 2014 où elle était alors particulièrement élevée avec un taux record de 68 %. Pour le département de Saône-et-Loire, le taux de participation est de 48 % avec un vote mixte cette année : en ligne, par courrier et à l’urne, et la plupart des votes ont été exprimés en ligne. Pour le département du Lot, avec 52 % de participation moyenne, contre 60 % en 2014, on compte un quart des votants à l’urne et trois quarts par correspondance. Et au sein de la communauté d’agglomération Mont Saint-Michel, le taux de participation pour les votants par correspondance se situe à 71 %, et pour ceux qui votaient par bulletin dans les urnes le taux est de 65 %.

Le reflet de ce qui se passe aujourd'hui 

« On a toujours pas complètement élucidé la cause de cette faible participation », explique un responsable de la communication interne d’un département. Pour les communicants publics, ces résultats sont « le reflet de ce qui se passe aujourd'hui ». Il faut en effet en rechercher les raisons dans la situation actuelle que traverse la fonction publique. Les changements de périmètre, les fusions ou mutualisations passées ou à venir ont perturbé les agents et distendu le sentiment d’appartenance à une communauté de travail. Les remises en cause des services publics et de la fonction publique, les réformes incessantes comme au sein de l’Éducation nationale, ont aussi créé le sentiment d’une certaine inutilité du dialogue social. Au risque, comme avec le mouvement des Gilets jaunes, de recherche ensuite d’autres formes d’expression. La faible participation « reflète le désenchantement d'un certain nombre d'agents », reconnaît Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT).