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La compublique face à une crise de confiance partout en Europe

Publié le : 5 juillet 2021 à 20:30
Dernière mise à jour : 13 juillet 2021 à 10:52
Par Yves Charmont

Lors de la dernière séance plénière du club des communicants des gouvernements européens, depuis la République de Serbie, le principal sujet d’échange a été la lutte contre la désinformation, les relations avec la communauté scientifique et des propositions de synergies et de stratégies communes. De nombreuses interventions pouvaient trouver écho à l’échelle de nos territoires.

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Lors de ces deux journées de travail, les 10 et 11 juin derniers, les membres du Club de Venise (le comité de pilotage des communicants des États de l’Union européenne) se sont longuement interrogés sur les conséquences de la pandémie sur les relations avec les citoyens. Triste constat, fait d’entrée de jeu lors d’une table ronde confiée à Claire Pimm, directrice du « National Resilience Hub ». Cet organisme a été créé par le gouvernement britannique en mars 2020 en réponse à l'épidémie de Covid-19. Au cours des huit derniers mois, il a fourni l'un des plus importants efforts intergouvernementaux de communication et coordonné une réponse de communication 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, à une urgence sans précédent.

Un optimisme mesuré

Le ton a été donné par le président de ce club de communicants : lucide, sévère même, mais raisonnablement optimiste sur les avancées en termes de communication à travers les méthodes, outils et stratégies débattus lors de cette réunion en visioconférence.

Nous ne vivons pas dans notre bulle, il faut intégrer les publics, les jeunes, soutenir le travail des journalistes.

Vincenzo Le Voci, président du Club de Venise

Le vendredi 11 juin, en milieu de matinée, Vincenzo Le Voci déclarait : « Nous ne vivons pas dans notre bulle, il faut intégrer les publics, les jeunes, soutenir le travail des journalistes. Notre plan d’action est de plaider en faveur des médias indépendants qui sont le pilier de tout système démocratique. Il faut créer un environnement sûr pour la production d’une presse de qualité. Ce sera l’un des axes du 35e anniversaire de notre club. » Une intervention qui rejoint la réflexion engagée à l’échelle locale, dans le réseau de la communication publique et territoriale, et en réponse, de façon étonnante, à l’ouvrage de Franck Bousquet, La Presse quotidienne régionale. Un sujet qui ne manquera pas d’apparaître dans un autre travail au niveau de la coopération entre États, au sein d’un groupe d’experts de l’OCDE auquel Cap’Com participe.

Des solutions, des préconisations

Lors du dernier temps de travail de cette plénière, toujours localisée de façon virtuelle en Serbie, une intervention a particulièrement retenu notre attention, celle de Marco Incerti, directeur de la communication de l’Institut universitaire européen de Florence.

Il en a présenté le Centre pour la liberté et le pluralisme des médias (Centre for Media Pluralism and Media Freedom – CMPF), un centre de recherche et d’expérimentation chargé de développer des solutions innovantes et de les mettre à disposition des autorités publiques en Europe et au-delà. Une mission qu’il accomplit par exemple avec l’Observatoire du pluralisme des médias dont les derniers résultats ont été présentés pendant cette séance plénière du Club de Venise.
Lors de son intervention brillante, Marco Incerti a notamment développé une méthode pour riposter à la désinformation avec ce plan reposant sur cinq piliers (issus d’une réflexion commune entre l’European University Institute et l’European Digital Media Observatory qui bénéficie du soutien de la Commission européenne).

Cinq piliers pour riposter à la désinformation

  1. Mettre en place une plateforme collaborative sécurisée pour vérifier les informations, les analyser et en rendre l’accès public.
  2. Créer un organe de gouvernance pour garantir le travail de la plateforme et établir un accès sécurisé à ses données.
  3. Soutenir et faciliter la coordination des activités indépendantes de vérification des faits ainsi que les sources communes validées et le matériel d'éducation aux médias.
  4. Soutenir et faciliter la coordination des activités de recherche universitaire sur la désinformation en Europe et créer un référentiel de la littérature scientifique sur ces sujets.
  5. Donner un apport académique et un appui méthodologique aux pouvoirs publics dans le suivi des politiques mises en place par les plateformes en ligne.

Des rendez-vous, une promesse

Ana Brnabić, Première ministre de la République de Serbie
©OPSI-OECD

En clôture, Ana Brnabić, la Première ministre de la République de Serbie, qui avait visiblement suivi les débats, s’est exprimée en adressant aux communicants publics une forme de confession, appelant à plus de communication pour une meilleure compréhension entre citoyens, entre citoyens et pouvoirs publics, entre pays voisins… bref, au sein du vaste village mondial connecté qui constitue notre espace commun : « Nous avons mesuré combien peuvent coûter les fausses informations, en vies. Il ne faut pas seulement donner les bonnes informations en temps et en heure : il faut combattre les fausses informations. »

Nous corrigeons de manière instantanée ce qui est faux. Pour cela nous cultivons la coopération et l’échange d’informations avec nos voisins.

Ana Brnabić, Première ministre de la République de Serbie

Elle poursuit en décrivant l’action de son gouvernement et de sa communication : « Nous corrigeons de manière instantanée ce qui est faux. Pour cela nous cultivons la coopération et l’échange d’informations avec nos voisins. » Un investissement qui est également en lien avec un autre objectif : « La Serbie a fait de grands efforts, concernant la transparence, et des progrès considérables pour devenir membre de l’Union européenne, notamment sur la liberté de la presse. » La Première ministre s’est dite enfin heureuse du travail produit virtuellement lors de cette visioconférence organisée par le Club de Venise, ce qui a permis au président du Club de rebondir pour donner les rendez-vous à venir pour les communicants européens. Il a, à cette occasion, annoncé un rendez-vous qui sera porté par Cap’Com pour le Club de Venise, en février, dans la capitale verte européenne 2022. C’est en effet à Grenoble – et en présentiel ! – qu’un colloque international visant des communicants publics territoriaux se tiendra sur le thème suivant : « Citoyenneté et transition environnementale dans les territoires : le rôle de la compublique dans les différents pays de l’Union européenne ».
Nous aurons bien évidemment l’occasion d’y revenir.