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Attaché de presse : un métier en réflexion

Publié le : 2 octobre 2019 à 12:41
Dernière mise à jour : 15 janvier 2020 à 16:22
Par Yves Charmont

Le cliché de l’attachée de presse, dossier en main, exigeante et pressée, sortant du bureau jouxtant ceux du cabinet et du président, a vécu. Mais le métier demeure. Il évolue même furieusement, sous l’impulsion de celles et ceux qui défendent des compétences et une expertise. Une problématique commune à bien d’autres métiers de la communication publique. En cela, ces personnes rejoignent une réflexion plus large, commune aux communicants publics auxquels elles apportent une vision affûtée.

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Ce fut pendant longtemps un territoire à part. Quelquefois réservé à des personnes très proches des élus, quelquefois réservé à l’usage exclusif du patron ou de la patronne, souvent détaché du reste de la communication publique. Avec les relations de presse, on entrait dans le carré VIP. Et la relation directe avec les élus et la presse était gardée jalousement, tout comme l’information… Un état de fait entretenu par chacun des acteurs des relations publiques, la gouvernance comme les journalistes ainsi accrédités. Une situation qui cachait souvent le rôle exact des personnes qui exercent ce métier : coordination des prises de parole, préparation des dossiers de presse, identification des enjeux stratégiques, maîtrise des jeux d’acteur, entretien d’un réseau, connaissance des pratiques journalistiques, etc.

Foisonnement digital

C’est sans doute la généralisation des outils connectés qui a brisé le modèle. Le filtre RP ne fonctionne plus. De passage obligé, de facilitateur, avec un carnet d’adresses gros comme le Bottin du territoire, connaissant les allées et venues des élus sur le bout des doigts, le voici bousculé par l’étalement numérique, avec son cortège de « posts » et de connexions spontanées. Chaque intervenant de la vie démocratique locale cultive jalousement son jardin digital et sa floraison de « likes » si gratifiante. L’accès à l’information est protéiforme et inconstant. Le journaliste obtient le numéro de portable de l’élu… et réciproquement. L’info viendrait ainsi directement de la source, brute. Les émetteurs partent à la conquête des influenceurs, au hasard des fonctions de leur smartphone. L’information, source de pouvoir, est traitée sans filtre, avec l’authenticité de l’amateurisme… ou l’inverse !

Un lieu commun de la communication

Et c’est un véritable changement de pied que l’on observe, comme si le métier d’attaché de presse sortait de son espace réservé pour partager ce constat avec les autres métiers de la communication publique. Que de convergences en effet ! Photographes, journalistes de la presse territoriale, chargés de communication, webmestre… la liste est longue des pratiques professionnelles submergées par la généralisation des outils numériques de communication. Une simple analogie : la vidéo, qui demandait des moyens coûteux et complexes, nécessitant des professionnels aguerris pour construire, réaliser et diffuser les contenus. C’est évidemment oublier que, comme pour la vidéo, les RP nécessitent une expertise, celle de la relation, et une vision, en l’occurrence stratégique. Les métiers de la communication, souvent identifiés par les outils qu’ils utilisent, ont perdu une part de leur statut avec l’accès par tous aux moyens de diffusion. Ces métiers, et pas seulement les RP, vont-ils être effacés de l’espace public local ?

Une expertise irremplaçable

Il suffit que la machine médiatique s’emballe sur les réseaux sociaux pour que l’on se retourne vers les professionnels. « Ah, on pensait mener la danse avec des tweets matinaux ! et on s’en remet aux RP pour faire les pompiers… » Mais les journalistes ont tourné le dos et ne reconnaissent plus le métier d’attaché de presse pour ce qu’il est. Son expertise doit faire l’objet d’une légitimation afin de pouvoir donner la mesure. Ici, à Strasbourg (voir encadré), des représentants de cette profession ont parfaitement identifié les leviers permettant de redonner une valeur à ce maillon vital de la parole publique. Il leur a fallu descendre dans l’arène, travailler avec lucidité et constater les convergences avec leurs collègues – acteurs comme eux de la com publique. Acquérir de nouvelles compétences et se former en transversalité, affirmer leur rôle d’expert, de conseiller stratégique, ciseler les messages, construire des réseaux dans l’univers versatile des médias dématérialisés, voici une petite partie des enjeux évoqués. Ce bel exercice, à l’échelle d’une profession, trouve également beaucoup de résonances avec les métiers connexes. Nous avons là des espaces communs à construire ; rendez-vous au Forum Cap’Com de Bordeaux pour la suite.

À Strasbourg, les attachés de presse ont imaginé les relations presse de demain

À l’invitation de la ville de Strasbourg, et en partenariat avec Cap’Com, une trentaine de professionnels venant de grandes collectivités françaises (départements, régions, métropoles, etc.) se sont retrouvés pour une journée d’introspection et de prospective sur le métier d’attaché de presse, le mardi 1er octobre 2019. Les participants ont été accueillis à l’hôtel de ville de Strasbourg, par Jean-François Lanneluc, dircom et dircab du maire de Strasbourg et du président de l'Eurométropole, et Ariane Laffon, responsable du service presse de la ville et de l’Eurométropole de Strasbourg, qui organisait cette rencontre. Guidés par deux consultants en intelligence collective, ils ont travaillé en groupes.

Accueil des participants

D’abord pour se projeter en 2030 : pratiques, écosystème, état d’esprit… ils ont tenté d’imaginer l’attaché de presse de demain et de créer la une d’un magazine publié en 2030 consacré au métier. Un travail conduit avec des journalistes de la presse locale et des directeurs et responsables de communication présents toute la matinée.

matinée

Ensuite, pour réfléchir en mode « world café » aux problématiques posées par les changements qui bousculent la profession, mais aussi aux enjeux et aux opportunités qui en découlent. Un après-midi d’échanges entre attachés de presse qui a permis de partager des premières pistes d’action à mettre en œuvre en rentrant dans sa collectivité. Et surtout des envies : celle de se rencontrer plus souvent et celle de se confronter à nouveau aux journalistes pour mieux connaître et répondre à leurs attentes.

Cette rencontre strasbourgeoise, a conclu Yves Charmont, directeur de Cap'Com, a donné une première impulsion qui sera prolongée par la constitution d’un groupe de travail « relations presse », par un atelier de restitution de cette réflexion collective et un tapis de parole au 31e Forum de la communication publique et territoriale de Bordeaux. Cap’Com se fera aussi l'écho dans ses colonnes des conclusions des débats sur ces sujets.

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