Les communicants internes mobilisés autour des enjeux majeurs des collectivités
La communication interne est sortie renforcée de la crise sanitaire, dans son rôle pivot et son caractère structurant. Si la fonction reste à consolider, elle peut désormais capitaliser sur ses compétences et sa légitimité pour accompagner les grands enjeux d’actualité pour les collectivités locales. Réunis à Paris, les communicants internes du secteur public ont œuvré, pendant deux jours, à renforcer leurs stratégies au service de ces défis.
Le rendez-vous annuel des communicants internes du secteur public s’est déroulé les 6 et 7 avril. Malgré un mouvement de grève, 200 professionnels ont convergé à Paris. Ensemble, ils ont discuté des moyens de faire avancer les grands défis du moment au sein de leurs organismes, ont partagé leurs bonnes initiatives et affiné leur méthodologie, tout en prenant le temps des échanges et de la convivialité entre pairs.
Recrutements et nouvelles postures managériales : trouver le point d’équilibre
En ouverture de ces journées, les débats autour des résultats de la Radioscopie 2022 l’ont bien montré : la communication interne du secteur public a gagné en maturité.
Qu’elle soit rattachée à la communication externe avec un rôle plutôt opérationnel et événementiel ; ou bien aux ressources humaines ou à la direction générale avec un positionnement plutôt stratégique, la com interne reste une fonction transversale. Selon Éric Fauconnier, directeur de la communication et des relations internes d’Angers Loire Métropole, et Vanessa Gotti, responsable de la communication interne de la ville de Chatou, tous deux appelés à porter leurs regards d’experts sur les résultats de cette étude, la com interne doit être au cœur de l’action et de la décision pour avoir une marge de manœuvre et d’influence. C’est ainsi qu’elle accompagne, avec une position de plus en plus centrale, les grandes problématiques du moment pour les collectivités locales : transformations du travail et nouvelles postures managériales ; enjeux de recrutement et d’attractivité du service public.
Face aux problématiques de recrutement, la question du rôle et des moyens d’action des communicants internes dans les dispositifs de marque employeur revient sans cesse. Et c’est un juste équilibre qu’ils sont appelés à mettre en place. Les dispositifs de marque employeur sont en plein développement au sein des collectivités locales. Mais les différents intervenants tirent la sonnette d’alarme.
Ce que l'on sent à l'intérieur, on le véhicule à l'extérieur.
Éric Fauconnier
Selon Vanessa Gotti et Éric Fauconnier, la marque employeur est une belle opportunité. Tant pour faire briller les agents et leur engagement que pour positionner la communication interne à un niveau global et stratégique. Néanmoins il faut être vigilant à ne pas marquer de décalage entre l’image affichée et la réalité vécue par les agents. Surtout en période de tensions sociales. Travailler la marque employeur en contexte de difficultés de recrutement, oui. Mais tout en veillant au bon alignement avec la réalité des agents. « Attention à l'effet Bifidus inversé, alerte Éric Fauconnier en référence à un célèbre slogan publicitaire. Ce que l'on sent à l'intérieur, on le véhicule à l'extérieur. » Vanessa Gotti attire l'attention sur le fait qu'« il y a un problème de valeur quand on donne une certaine image, qu’on dit que tout va bien, alors qu’il y a des tensions sociales en interne ». Pour Sigrid Berger, fondatrice de profil public et intervenante lors d’un atelier méthodologique sur les enjeux du recrutement au sein des collectivités, « on ne crée pas une marque employeur. On la développe ».
Autant d’objectifs qui impliquent un travail de fond – et de longue haleine – en concertation avec les agents et dans toutes les dimensions du dialogue interne. Et cette ligne de conduite, si elle n’est pas tenue, peut mener à des crises ou conflits au sein des organisations qu’il convient de savoir identifier avec discernement si l’on veut pouvoir « soigner » efficacement le collectif en interne, comme l’a souligné Bruno Simon, sociologue, en clôture de ces Rencontres.
Quand on veut mobiliser et impliquer, la seule communication interne ne marche pas. Il faut un relais managérial.
Vanessa Gotti
Deuxième défi d’actualité pour les communicants internes publics, la question de la communication managériale. « Quand on veut mobiliser et impliquer, la seule communication interne ne marche pas. Il faut un relais managérial », insiste Vanessa Gotti. Impliquer les managers mais aussi les agents, les communicants internes s'y emploient à travers la mise en place de dispositifs concrets. Grand Orly Seine Bièvre a ainsi présenté sa Fabrique du management, le département de Seine-Maritime ses trophées de l’innovation interne et la Métropole de Lyon ses rencontres métropolitaines. Les échanges autour de ces initiatives ont été riches et foisonnants. Pour autant, la communication managériale reste l’une des pistes de travail principales sur la feuille de route des communicants internes publics.
La vidéo, un outil qui se démocratise en interne
Les résultats de l’étude sur l’état des intranets dans le secteur public le montrent bien : la vidéo prend une place de plus en plus importante. Que ce soit pour expliquer un projet ou une action avec pédagogie, ou bien pour mettre à l’honneur des agents par le biais de portraits diffusables tant en interne qu’en externe, les communicants internes manient l’outil avec dextérité et n’ont pas à rougir face à leurs collègues de l’externe !
Journal interne et intranet : des supports qui restent essentiels
Si les réflexions autour du positionnement et des grands enjeux de la com interne ont jalonné ces deux journées de Rencontres, le travail méthodologique et pratico-pratique a placé le curseur sur deux outils majeurs. Le journal interne tout d’abord, qui – malgré la digitalisation des usages et les interrogations autour de son impression ou de sa distribution quand les fiches de paie seront dématérialisées – reste un support incontournable pour la bonne diffusion de l’information. Notamment auprès des agents non connectés. Une conférence hop lui a été consacrée. L’occasion de passer en revue une diversité de journaux internes bien pensés ou fourmillants de bonnes idées.
Outil central, l’intranet a quant à lui été en grande partie abordé autour de la présentation de l’étude sur l’état des intranets dans le secteur public. En comparaison avec la même enquête menée en 2017, cette étude mesure les changements et évolutions en cours depuis la crise sanitaire. Les contenus des intranets, leurs fonctionnalités, leur gestion en interne ainsi que leur évaluation : ces quatre aspects de l’intranet ont été présentés par Didier Rigaud, maître de conférences à l’université Bordeaux Montaigne, et commentés par Franck Confino, consultant numérique pour le secteur public. La synthèse de cette analyse fera l’objet de publications à venir. Néanmoins, plusieurs messages portés par les intervenants peuvent être mis en avant.
- L’évolution principale des intranets depuis la dernière étude sur le sujet en 2017 est leur accessibilité en mobilité. Plus de 65 % des intranets étudiés en 2022 sont en effet adaptés pour une lecture sur smartphone et/ou sur tablette quand ils n’étaient que 35 % en 2017. Pour Franck Confino, penser l’intranet en « responsive design » ou « mobile first » est l’un des critères pour réduire la fracture numérique et aller vers plus de sobriété numérique.
- Le secteur public a une large marge de manœuvre en matière d’accessibilité. En effet, seuls 42 % des intranets sont conformes au référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA), qui reste pourtant une obligation légale.
- Les fonctionnalités de l’intranet, et notamment celles qui permettent de le relier au système d’information RH, sont le noyau dur du cahier des charges lorsque l’on envisage de créer ou de refondre son outil.
- Faire choisir le nom de l’intranet aux agents peut être une belle opération de communication interne et peut également mener à un dispositif de marque média interne.
- Les réseaux de contributeurs participent à une information qualifiée. Ceux-ci s’animent et il est important de leur allouer des moyens humains.
- En matière d’évaluation, « les statistiques doivent être un chantier permanent », selon Franck Confino. Alors qu'elles sont sous-investies, il est plus intéressant de les exploiter régulièrement que de mener une importante opération d’évaluation tous les dix ans.
- Le travail en mode projet est le gros enjeu de l’intranet. Pour cela, une collaboration tripartite entre la DSI (pour les aspects techniques, fonctionnels et de sécurité), la DGS (pour le budget RH et le déploiement) et la communication interne (pour les contenus, les besoins et les usages) est essentielle.
Prendre soin du métier, en toute convivialité
Parce que les communicants internes prennent quotidiennement soin des agents de leurs collectivités, les Rencontres nationales de la communication interne sont également une opportunité pour se ressourcer en toute convivialité. C’est pourquoi de nombreux temps de réseau sont organisés tout au long de ces deux journées. Aussi, les communicants internes se sont notamment retrouvés en danse et en musique lors de la soirée grecque organisée en clin d’œil à la thématique de l’année : « Moins de blabla, plus d’agora. »